dimanche 1 décembre 2013

Elektra de Richard Strauss à l'Opéra Bastille

Oreste, Electre et Hermès
devant la tombe d'Agamemnon
Les mille et une occupations de cet automne ont retardé la mise en ligne de mes impressions sur la représentation d'Elektra de Richard Strauss que j'ai vue à Bastille le 11 novembre dernier. Je vous les livre donc aujourd'hui.

Une magnifique soirée où, pendant 100 mn, j'ai été secouée, ébranlée, choquée mais, aussi, enchantée, transportée, chavirée, enflammée... !

Cette oeuvre, musicalement d'une force inouïe, frappe autant les oreilles que l'esprit. La tragédie grecque est sublimée par le lyrisme et la puissance dégagés par cette orchestration flamboyante.

La direction de Philippe Jordan est, une fois encore, exemplaire de lumière et de précision. Depuis l'avant-dernier rang du second balcon, j'ai perçu les interventions de certains pupitres comme autant de mini-parties solo et j'ai savouré l'intensité de la masse orchestrale qui résonne jusqu'au fond du corps. Un grand bravo au talentueux orchestre de l'Opéra National de Paris, si riche en nuances et en sonorités.





J'ai rarement été déçue par les mises en scène de Robert Carsen.

J'ai d'autant plus apprécié celle-ci que, pour une fois, les spectateurs des balcons sont, certainement, ceux qui en ont le mieux profité. Les mouvements chorégraphiques en étoile ou en déplacements géométriques étaient magiques. 




L'arrivée de Klytämnestra, vêtue de blanc sur son grand lit blanc, porté par les servants jusqu'au duo, la place résolument au-dessus du lot commun malgré son crime.


La tombe d'Agamemnon, élément central de la mise en scène, est en quelque sorte la source où Elektra prend toute sa force de résistance.

Le tout est constamment baigné par les très beaux éclairages de Carsen lui-même et de Peter Van Praet.

Une mise en scène où l'esthétisme produit l'émotion. Beaucoup - et c'était tentant - ont comparé cette production à celle de Patrice Chéreau cet été à Aix. Ils ont regretté, ici, de ne pas avoir été pris aux tripes par l'action comme on l'était par l'intensité dramatique que dégageait la production de Chéreau où le metteur en scène avait su insuffler aux chanteurs, et surtout à son Elektra, une formidable incarnation intensément dramatique.

La mise en scène de Carsen agit différemment et procure une autre émotion, produite par l'esthétisme des déplacements, les hiatus d'atmosphères, les changements de climats.

Il y a, à mon sens, de la place pour les deux partis pris et je me suis, personnellement, autant régalée de l'une que de l'autre.

Evgeny Nikitin
Ricarda Merbeth
Waltraud Meier
Côté chanteurs, écrasés par la masse orchestrale de cette oeuvre-choc, on admettra de perdre une partie de la prosodie lorsqu'ils s'expriment dans le registre médium. Cependant, au final, les différents rôles ont été très honnêtement et honorablement servis et si la distribution - très homogène de Evgeny Nikitin (Oreste) en passant par la Chrysothémis de Ricarda Merbeth et la Klytämnestra de Waltraud Meier et jusqu'à la très belle prestation de Irène Theorin en Elektra - ne nous a pas entièrement comblés, elle nous a néanmoins procuré beaucoup de plaisir et de bonheur.


Irene Theorin


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