vendredi 18 octobre 2013

Chéreau, suite... et "FIN"

Patrice Chéreau aux saluts de la première d'Elektra le 10 juillet 2013 à Aix-en-Provence
Cette photo, c'est l'excellent choix des proches pour le programme de la cérémonie de Saint-Sulpice.

L'église était pleine. Pleine des VIP (politiques et artistes), pleinde de quelques  rares curieux, pleine enfin de tous les anonymes qui, comme moi, n'étaient là que pour un dernier adieu à Patrice Chéreau.

Cérémonie à la fois riche et sobre où les comédiens se sont succédés pour dire Shakespeare, Jean de la Croix, la Genèse, un psaume et la prière.

Cérémonie où les religieux ont su à la fois rendre hommage au défunt et livrer leur croyance par un judicieux choix de l'Evangile de Jean.

Cérémonie où la musique a élevé nos coeurs et nos âmes par les sons de l'orgue sur lequel se sont succédés Daniel Roth et Bernard Faccroule. Par la voix de Waltraud Meier dans deux Wesendonck lieder de Richard Wagner (Im Treibhaus et Traüme) accompagnée au piano par Alphonse Cemin. Par la voix aussi de Stéphane Degout dans une Cantate de Bach (Schlummert ein) soutenu à l'orgue par Bernard Faccroule.

Je me souviendrai du silence recueilli et respectueux qui régna tout au long de l'entrée du cercueil, au seul son d'une marche, forte et sombre, qui aurait pu venir - qui venait peut-être - de la B.O. de "La Reine Margot".

Je me souviendrai peut-être davantage encore de la traversée inverse du cercueil sous les applaudissements nourris de tous, cependant que l'orgue jouait une transcription d'un moment wagnérien.

Adieu Monsieur Chéreau !

lundi 14 octobre 2013

Au revoir Monsieur Chéreau !

Patrice Chéreau comme je l'aime !


Profession ? : Metteur en scène de théâtre et d'opéra, réalisateur et scénariste de cinéma, acteur, directeur de théâtre...

Au choix donc, on pouvait aimer et admirer l'une ou l'autre de ses réalisations, de ses engagements ou tout prendre en bloc comme un cadeau. Moi, je prends le cadeau - même si je n'ai pas adhéré à toute son oeuvre - et j'en remercie du fond du coeur l'artiste qui fut capable de nous laisser un pareil héritage.

Cet homme dont le regard intense brûlait de tous les feux de ses passions qu'il s'est efforcé de mener au bout. Au bout de ses fantasmes, au bout de ses rêves, au bout de ses conceptions, de ses convictions, au bout de son génie de l'expressivité qu'il savait transmettre aux corps, de la puissance du geste, des élans, au bout de son lyrisme aussi échevelé qu'ardent.

De surcroît, ce regard est bourré de charme. Il nous emmène. Il a dû emmener chanteurs et acteurs au plus profond d'eux-mêmes pour qu'ils nous bouleversent autant.

Ce boulimique, capable de mener de front trois projets, après la direction du Théâtre de Sartrouville (à 22 ans !), ses mises en scène au Piccolo Teatro de Milan où G. Strehler l'invite, le TNP de Villeurbanne avec Planchon, il signe son premier film "La Chair de l'orchidée" en 1974 ; il a trente ans !

En 1976, c'est Bayreuth où il signe une mise en scène du Ring de Wagner qui deviendra mythique et sera jouée jusqu'en 1980. Très controversée à sa création, c'est sous les acclamations d'un public convaincu par sa vision de l'oeuvre que les représentations des années suivantes se terminent. Moi-même déroutée à la première vision, j'ai toutefois toujours été enthousiasmée par l'implication, l'incarnation au sens propre, des chanteurs. Dolnald Mc Intyre (Wotan) et Gwyneth Jones (Brunehilde) ont laissé des émotions indélébiles dans ma mémoire par l'humanité dont ils ont nourri leurs personnages.

Et cette année encore, j'ai été suspendue à mon écran lors de la diffusion par ARTE Live d'Elektra de Richard Strauss que Chéreau venait de mettre en scène à Aix en Provence. En 2007, "De la Maison des Morts" de Janacek à Aix encore et, la même année, le Tristan et Isolde à la Scala. Autant d'occasions de vibrer encore davantage aux accents de ces opéras.

Au cinéma, c'est tout d'abord l'acteur que j'ai admiré dans le Danton de Wajda où il incarnait un Camille Desmoulin tellement ardent. Je n'ai pas vu tous ses films. Intimité m'a sidérée par la force que dégagent les scènes de sexe, emplies à la fois d'images très crues et pourtant d'une infinie pudeur. De plus, il filme Londres si particulièrement, en homme pressé qui ne livre qu'une atmosphère, mais la véritable.

Et je suis une fan de La Reine Margot, un film-opéra, magnifique de violence et de rythme, de force et de tendresse, d'amour et de haine. On y comprend toute l'horreur de la Saint-Barthélémy et des ressentis des acteurs historiques qui l'on décidée.

Directeur de théâtre intransigeant et génial, ce fut avant tout un homme de passion.

Je ne suis jamais allée dans vos théâtres, Cher Maître, mais je sais que vous y avez fait nombre de choses importantes, talentueuses et nécessaires.

J'étais devant mon postes hier soir pour la rediffusion de La Reine Margot et j'irai certainement vous saluer à Saint-Sulpice mercredi 16 à 11 h 30, parmi beaucoup d'admirateurs peinés, sans aucun doute !