jeudi 31 janvier 2013

Fresque grandiose à l'opéra !

La Khovantchina de Modeste Moussorgski
Drame musical historique en cinq actes (1886), orchestré par Dimitri Chostakovitch

Pour ce qui est de la gestation de l'oeuvre, je vous invite à cliquer ici.

Andrei Serban
Pour ce qui concerne la très belle soirée d'opéra à laquelle nous avons assisté ce lundi 28 janvier 2013, je vous parlerai - une fois n'est pas coutume - d'abord de la mise en scène de Andrei Serban.

Production de 2001 reprise ici avec bonheur, la reconstitution de la Russie de Pierre Le Grand, tout en couleurs et en mouvements  - mais sans gesticulation - est une réussite. Des éclairages à la chorégraphie, des costumes, à la fois somptueux des princes et simples des chasubles des "Vieux Croyants", aux décors représentatifs des lieux, tout est excellent.

Réussie également la direction d'acteurs ; chaque chanteur campe un personnage dont il est véritablement imprégné et à qui il restitue une réelle personnalité.

Il est vrai aussi qu'ils sont bien aidés en cela par la grande qualité vocale dont ils sont tous dotés. Car c'est également dans la très belle homogénéité de la distribution que réside tout le plaisir pris tout au long de ces quelques trois heures et demie de spectacle.

Larissa Diadkova
Des voix magnifiques donc, desquelles je relève le chant somptueux de Larissa Diadkova dont le timbre si bien coloré sert admirablement, d'un bout à l'autre de la tessiture, le très beau rôle de Marfa. Du second balcon, on percevait chaque inflexion de cette voix aux intonations sombres et aux aigus sonores sans perte de couleur.

Avant de passer aux rôles masculins - de loin les plus nombreux - un mot sur les deux sopranos : Marina Lapina, éblouissante de volume et de clarté dans le très court rôle de Susanna et Nataliya Tymchenko dont le timbre un peu acide ne laissera qu'un souvenir assez incolore du rôle - pâle lui aussi - de Emma.

Orlin Anastassov

Intense et prodigieuse, la voix de basse de Orlin Anatassov qui, d'un bout à l'autre du registre, sert le rôle de Dosifei, le prêtre qui guide les "Vieux Croyants". Le timbre est riche, lumineux et ample et chacune de ses apparitions tout au long de l'oeuvre est un vrai bonheur.




Gleb Nikolsky

Drapé dans son magnifique manteau écarlate chamarré d'or, Gleb Nikolsky est ce Prince Ivan Khovanski, chef du complot qui donnera son titre à l'opéra, que l'âge ancre dans ses traditions ancestrales auxquelles il s'accroche avec acharnement et fébrilité. Tout cela est extraordinairement rendu par la voix encore ample et cependant fragilisée de cette grande basse qui restitue toute la grandeur friable du rôle.

Sergey Murzaev




Et, dans ce florilège de voix graves, il convient de louer Sergey Murzaev qui nous éblouit au IIIème acte dans un monologue brillant de Chakloviti où ses qualités vocales nous laissent pantois.



Vladimir Galouzine



Après ce concert de louanges à la clé de fa, rendons hommage à Vladimir Galouzine, ténor au timbre d'airain sans défaillance dans le rôle épisodique du Prince Andrei Khovanski (le fils du comploteur...), de même qu'à Vasily Efimov dans celui de Kouzka.





Tous les autres rôles sont de haute tenue et concourent à l'équilibre de cette belle épopée.

Les Choeurs de l'Opéra de Paris restituent la partition dans toute sa splendeur dépaysante, déployant des trésors de netteté et de sonorités slaves.








Michail Jurowski




Sous sa baguette précise, inspirée et enflammée, Michail Jurowski emmène et contient tout ce plateau sans jamais se laisser déborder et en insufflant à l'ensemble tout le lyrisme de cette délirante partition.

vendredi 18 janvier 2013

Du côté de chez...

Jacques Emile Blanche est un portraitiste français qui peignit tout ce qui se mouvait dans la vie parisienne artistique et mondaine du début du XXème siècle.

Presque autodidacte, Blanche nous livre la personnalité la plus sensible de ses modèles, qu'il s'agisse de Barrès, Montesquiou, Gide, Cocteau, Stravinsky et, bien sûr, Proust.
Marcel Proust

Agencée en quelques lieux feutrés (salon, jardin d'hiver...), à l'ambiance surannée qui nous restitue un parfum de "temps perdu" et nous plonge au coeur de "la Recherche", c'est un délice que de croiser les regards ou les attitudes de ces personnages historiques qui appartiennent à notre patrimoine, que ce soit par leur oeuvre ou par la trace qu'ils ont laissée dans l'oeuvre de Proust.

A ne pas manquer si vous avez un peu de temps jusqu'au 27 janvier !!!

De Wagner à Renoir en passant par Venise

Les journées défilent aussi vite en 2013 qu'en 2012 ! Nous voilà déjà à la mi-janvier et j'ai des tas de choses à partager avec vous...

Concert de l'Orchestre Philharmonique de Radio-France, direction Marek Janowski
Un premier concert à Pleyel, le dimanche après-midi 6 janvier, où l'Orchestre Philharmonique de R.F. se retrouvait face à Marek Janowski, son ancien chef, pour ouvrir l'année Wagner.
Comme vous le savez, les concerts le week end ne sont pas de mon goût, mais un cadeau ne se refuse pas et surtout pas un cadeau musical.

Marek Janowski est un excellent chef. Le "Philhar" lui doit les grandes qualités techniques qu'il a su lui transmettre durant les années qu'il a passées à sa tête. Il est reconnu comme un bon chef wagnérien. Cependant, ce n'est pas avec un enthousiasme débordant que je suis sortie de Pleyel ce dimanche soir, malgré une seconde partie de programme beaucoup plus libératrice que la première.

Erreur de programmation à mon sens que ce début de concert, à 16 heures un dimanche, avec une entrée en matière qui tenait du plat de résistance. Personne n'était prêt - ni les spectateurs en fin de digestion, tout juste sortis des transports en commun ou des circuits de recherche de parking, ni les musiciens et chanteurs pour lesquels le défit était grop grand de créer, en quelques minutes, l'atmosphère de "l'Enchantement du Vendredi Saint", extirpé du monumental Parsifal. On n'entre pas dans l'essence d'une oeuvre pareille en quelques mesures, enfin, pas moi dans tous les cas.
L'orchestre se contente de jouer la partition, bien, mais sans le souffle à la fois liturgique et poétique que requièrent ces instants qui doivent tenir, presque, du miracle.
Stephen Gould


Albert Dohmen
Le ténor américain Stephen Gould projette un chant consistant et coloré mais dénué de l'émotion qu'il devrait contenir. Le léger vibrato de la basse Albert Dohmen n'a pas entamé le très beau timbre de sa voix, ce qui ne suffira pas à nous restituer le climat de ce moment musical.



Au final, ce passage si important dans l'oeuvre est resté au stade du morceau bien exécuté.
D'autant plus dommage que le programme s'enchaînait avec une interprétation tout à fait banale de "Siegfried-Idyll" qui, pour le coup aurait, bien évidemment, dû entamer le concert.Fort heureusement, les trois extraits du "Crépuscule des dieux" ont réveillé musiciens et spectateurs. "Le voyage de Siegfried sur le Rhin", "La Marche funèbre" et "l'Immolation de Brunhilde" nous donnèrent à entendre un Wagner d'une toute autre tenue. Sains atteindre à la magique clarté des couleurs de la fosse de l'Opéra de Paris sous la baguette de Jordan, ni aux profondes rondeurs de l'Orchestre de Bayreuth, le "Philhar, emmené avec précision et lyrisme a su se hausser à la hauteur des meilleurs.
Violetta Urmana a, quant à elle, empli Pleyel de toute la largeur de sa voix, sans écorcher les notes extrêmes.

Ouf ! Ce second concert (il y en avait eu un deux jours avant) ouvrait, en définitive, glorieusement la porte aux célébrations du bicentenaire de la naissance de Wagner.


  De Canaletto à Canaletto-Giardi ou de Maillol à Jacquemart-AndréEn l'espace de quelques jours, je parcourrai les salles des deux expositions consacrées au peintre vénitien de la Veduta.
Disons-le tout net : les deux expos se valent en qualité. Si Maillol se concentre sur le seul Antonio Canal dit Canaletto et nous offre, en plus des grandes toiles issues des collections italiennes, le précieux carnet de dessins conservé à Venise et "la chambre optique" - l'appareil qui lui servait à tracer les perspectives - Jacquemart-André quant à lui nous propose de mettre en parallèle les presque mêmes vues réalisées par Canaletto et par Francesco Guardi.
Si les ciels de Canaletto sont plus lumineux et les éclairages plus éclatants, Guardi décale légèrement les perspectives et anime davantage le Canal Grande et la Piazza San Marco.
Canaletto
Guardi


En résumé, entre deux visites de la Sérénissime, contempler les toiles de Canaletto ou de Guardi reste le meilleur moyen de respirer l'air de Venise !...


Les "Renoir" au cinéma : d'Auguste à Jean

Après ce déferlement d'art, j'attendais beaucoup du film "Renoir" de G. Bourdos, sorti récemment.
Trop sans doute pour ne pas être déçue par des dialogues assez pauvres et, surtout, rendus souvent incompréhensibles par la très mauvaise diction de certains interprètes, en particulier de la jeune Christa Theret. Anachroniques également, certaines expressions n'appartenant pas au vocabulaire courant de cette époque, même dans les cuisines.

A garder, la brillante démonstration de Michel Bouquet, formidable, la photo magistrale qui nous place au coeur des tableaux de Renoir.
Allez ! L'année ne démarre pas si mal...