jeudi 19 janvier 2017

Récital Ludovic Tézier - Garnier 15 janvier 2017

Tellement dans l'impatience du retour de Jonas Kaufmann dans Lohengrin à Bastille (premières critiques très élogieuses...) que j'en oubliais presque le récital de Ludovic Tézier à Garnier qui ouvrait mon année lyrique ce dimanche.

Et pourtant, Ludovic Tézier figure en très bonne place dans mon Panthéon lyrique (il apparaît même dans "Les divas ont besoin d'amour..." mon premier livre que l'on peut se procurer sur, Amazon ou Fnac) tant j'apprécie son timbre sombre, l'ampleur et la sonorité de sa belle voix de baryton, son volume impressionnant et les qualités de legato qu'il déploie, en particulier dans les rôles verdiens.

Seulement là, ces magnifiques qualités de chanteur d'opéra accompli ne sont pas celles qu'il convient de posséder en bon interprète de lieder ou de mélodies françaises...

Car, si dans les lieder de Schubert ou de Schumann, on lui reconnaît une excellente prononciation de l'allemand, elle ne suffit pas à l'expression du style. Le timbre sombre et la densité vocale m'ont paru mieux convenir aux quatre lieder de Schumann, mais les variations d'intensité ne sont pas là, ou bien pas où il faudrait.

Chez Schubert, l'ensemble manque un peu de fluidité, de clarté, de nuances. Et dans l'ensemble de cette première partie, tout est chanté beaucoup trop lentement, ce qui en accentue encore les imperfections.

Quant à la jeune pianiste Thuy Anh Vuong, elle joue Schumann comme Schubert et Schubert comme Schumann...

A l'entracte, ce "premier plat" nous laisse sur notre faim. On se dit que les mélodies françaises à suivre nous rassasieront davantage. C'est sa langue maternelle, il la chante si bien à l'opéra...

Quel dommage ce choix des "Chansons de Don Quichotte" de Jacques Ibert, préférées à "Don Quichotte à Dulcinée" de Maurice Ravel ! Je suis presque sûre que la ligne ravelienne aurait mieux convenu à la vaillance  de notre baryton.

Et là encore, déception. Le phrasé est bon, de même que la prononciation, évidemment.

Mais aussi trop lent encore le tempo de "L'invitation au voyage" et de "La vie antérieure" de Duparc. Tout comme celui de "L'horizon chimérique" de Fauré et, surtout, des "Berceaux" dont on perd, du coup, le balancement.

Alors oui, il parvient au bout de ces longues phrases de manière impressionnante. Mais au détriment du style et de la prosodie.

Et à vouloir canaliser cette voix généreuse, Tézier en lâche sa technique vocale et dérape dangereusement par deux fois, dont une dans "L'ile inconnue" (une des Nuits d'été de Berlioz) et laisse la salle un peu perplexe et sans enthousiasme.

Heureusement, deux des trois bis vont nous restituer tout le talent de notre chanteur d'opéra : "Zueignung" de Richard Strauss et "La romance à l'étoile", extrait de Tannhäuser de Richard Wagner où notre baryton national retrouve toutes ses qualités.

Au piano, Thuy Anh Vuong a joué Duparc comme Ibert, Fauré comme Berlioz et Strauss comme Wagner...

Ludovic Tézier chantera Simon Boccanegra de Verdi le 12 mars prochain au Théâtre des Champs Elysées. Gageons qu'il déploiera là toutes ses nombreuses qualités pour le plus grand bonheur de ceux qui l'entendront.

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